Avec l’OCVV, Angers figure sur la carte des institutions européennes en hébergeant la plus ancienne agence décentralisée de l’Union européenne implantée en France. Son président, Francesco Mattina, présente son établissement, ses perspectives de développement et annonce son futur déménagement.
C’est quoi l’OCVV ?
OCVV signifie Office communautaire des variétés végétales. Nous sommes une agence décentralisée de l’Union européenne.
Il en existe aujourd’hui près d’une quarantaine réparties dans tous les pays membres. La France en compte quatre : deux à Paris (une sur les questions financières et une sur la sécurité), une à Lille sur les chemins de fer et une à Angers. Cette dernière, créée en 1994 et implantée à Angers depuis 1997, a d’ailleurs été la première agence européenne décentralisée en France.
La mission de l’OCVV est de délivrer pour les nouvelles variétés végétales une protection juridique unique au moyen d’un droit de propriété intellectuelle qui est valable à l’échelle des 27 pays de l’Union européenne. Grâce à ce système, les créateurs de végétaux n’ont ainsi qu’un seul dossier de candidature à déposer pour faire leur demande au lieu d’un dans chacun des états membres de l’Union européenne.
Nous protégeons ainsi toutes sortes de variétés dans tous les secteurs : céréales, fleurs, plantes ornementales, fruits, légumes…
Et que représente l’OCVV à Angers ?
A Angers, nous sommes une cinquantaine de fonctionnaires employés par l’Union européenne. Parmi nous, quatorze nationalités différentes sont représentées. Parmi notre effectif, se trouve un grand nombre d’ingénieurs agronomes, de juristes et de personnel administratif.
Notre siège est actuellement situé au 3, boulevard du Maréchal-Foch mais nous nous répartissons sur trois sites différents. Et cette répartition a un effet sur nos modalités de travail.
Dans une démarche d’amélioration continue, nous avons donc mené pendant plusieurs mois une longue réflexion, notamment avec le soutien d’Aldev, afin de repenser notre implantation angevine et réunir l’ensemble de nos équipes au sein d’un site unique.
Ceci était d’autant plus important qu’au vu de l’augmentation de notre activité, il est envisageable que nos effectifs puissent croître d’une dizaine de personnes dans les prochaines années.
Et je peux vous l’annoncer : nous avons trouvé la solution à notre questionnement immobilier.
Vous allez donc déménager ?
Oui, l’OCVV devrait déménager fin 2025 – début 2026 au sein d’un projet appelé Nymphe, porté par le promoteur AVL Benoist et qui va sortir de terre dans le Carré d’Orgemont.
Une réponse qui nous satisfait pleinement, à la fois sur le plan fonctionnel, mais aussi sur le plan de notre impact environnemental car le bâtiment disposera d’un classement écologique très performant.
Pouvez-vous nous expliquer pourquoi est-il si utile de protéger des créations végétales ?
Une innovation qui répond à un besoin du marché représente une valeur financière évidente. Mais pour que cette valeur soit effective, il faut que cette innovation soit juridiquement protégée.
L’absence de protection limiterait considérablement la R & D mise en œuvre au sein des entreprises du végétal et des organismes de recherche. Nos titres de protection constituent donc une importante plus-value pour leurs détenteurs.
Au-delà de l’aspect purement juridique de notre mission, nous contribuons donc à l’enrichissement de la filière végétale européenne pour laquelle nous sommes un vecteur d’innovation.
Nous jouons donc un rôle essentiel autour de notions aussi importantes que sont aujourd’hui la stratégie « De la ferme à la table » et les réponses concrètes pour lutter contre le changement climatique.
Cela se traduit en particulier par le développement de végétaux affichant de meilleures valeurs nutritives, plus résistants aux maladies ou mieux adaptés au changement climatique…
Nous avons d’ailleurs publié courant 2022 une étude qui démontre clairement la valeur ajoutée de nos titres de protection sur la croissance et les objectifs de durabilité de l’Union européenne. (Lire la synthèse de cette étude)
Comment cela se passe-t-il concrètement ?
Les obtenteurs de nouvelles variétés nous déposent un dossier de candidature avec la description précise de la nouvelle variété qu’ils souhaitent protéger. Ce dossier est accompagné de semences.
Nous confions alors l’examen technique à des organismes partenaires situés dans différents pays de l’Union. Il est intéressant de noter qu’une de ces structures est elle aussi angevine : le Gévès à Beaucouzé qui prend en charge l’examen de différentes espèces, notamment les variétés de pommiers.
Pour déterminer s’il s’agit bien d’une nouveauté, le protocole suit un cahier des charges très rigoureux que nous résumons en trois lettres DHS : D pour distinction, H pour homogénéité et S pour stabilité.
La variété doit afficher des caractéristiques différentes de celles référencées dans notre base de données par d’autres variétés qui sont déjà notoirement connues. Pour être en mesure de le savoir, les plantes doivent avoir atteint un certain stade de maturité. La conclusion prend donc du temps : d’un an pour des plantes ornementales à six ans pour certains arbres comme les pommiers.
Combien de végétaux protégez-vous chaque année ?
Autour de 3 500. Depuis sa création, l’OCVV a reçu plus de 79 000 demandes et délivré 63 000 titres de protection. Plus de la moitié concernent des végétaux ornementaux.
La fleur qui arrive en tête des demandes, c’est la rose. Parmi les céréales, c’est le maïs. Parmi les légumes, la laitue, et, parmi les fruits, la pêche.
Combien coûte cette protection ?
Le dépôt de dossier coûte 450 €, l’examen technique entre 1 900 et 3 900 € par année de culture. Ensuite, le détenteur du titre de protection verse une taxe annuelle de 330 €. Tout ceci est à la charge du demandeur. Et grâce à ces rentrées d’argent, nous nous autofinançons.
Et d’où viennent les demandes ?
Pour l’essentiel, ces demandes sont faites par des entreprises européennes. Les Pays-Bas, la France et l’Allemagne constituent le trio de tête des pays d’origine. Mais nous avons aussi des candidatures de sociétés américaines qui veulent protéger leurs innovations sur le sol européen, ainsi que des demandes venues de Suisse qui héberge les sièges sociaux de quelques grandes entreprises d’agroalimentaire.
A ce sujet, il faut savoir que l’immense majorité des dossiers, plus de 90 %, sont déposés par des TPE et PME. Nous sommes donc un élément essentiel de défense de l’innovation au sein des petites structures.
Bio express Italien, Francesco Mattina est né à Naples en 1971. Il est marié et père de trois enfants. Après avoir suivi un cursus en droit, il se spécialise dans les questions liées à la propriété intellectuelle. Il commence une carrière d’avocat d’affaires avant d’intégrer en 2013 l’OCVV en tant que chef de l’unité juridique. Il devient vice-président de l’OCVV en 2017, puis président en février 2022.
Pour plus d’info : cpvo.europa.eu
Publié le 22 juin 2023